Un discours adressé au peuple russe

À l’occasion de la plus grande opération dirigée contre la Russie depuis la guerre froide.

Par Jochen Mitschka.

Peuple de Russie ! Je voudrais dire « chers amis », mais je n’ose pas. Je voudrais être votre ami, mais je comprends que ce ne soit pas facile à accepter après les atrocités que l’Allemagne a commises à l’encontre du peuple de l’Union soviétique et surtout du peuple russe. 27 millions de morts, soit le plus grand nombre de victimes de la Seconde Guerre mondiale. Mais je voudrais vous expliquer pourquoi je vous demande d’accepter mon amitié, malgré la politique de mon pays, qui, complètement détachée de l’opinion de la majorité des gens en Allemagne, est déterminée par d’autres forces. Et j’aimerais vous expliquer pourquoi moi, qui représente de nombreuses personnes nées après la guerre mais élevées par la génération de la guerre, je souhaite être votre ami.

Mon père a été décisif pour ma socialisation en Allemagne. Il a été blessé sept fois pendant la guerre, mais a été envoyé à plusieurs reprises sur d’autres fronts jusqu’à ce qu’une écharde dans la tête le rende invalide à vie peu avant la fin de la guerre. Il n’était pas un « fier guerrier ». Ma mère m’a raconté qu’un jour, d’anciens soldats ont voulu lui rendre visite pour le remercier de les avoir sauvés sous le feu. Mais il ne voulait rien savoir au sujet de la guerre. Ma mère m’a dit qu’il les aurait renvoyées.

Mon père n’aimait pas parler de la guerre. Il avait honte d’avoir servi comme soldat pour un système qu’il voyait commettre des crimes. Mais quand, contre son avis, je me suis engagé pour quatre ans dans la Bundeswehr au début des années 1970, dont deux ans de « service » à l’OTAN à Mons, il m’a raconté comment il était redevenu religieux pendant la guerre. Il m’a raconté comment les gens ont perdu la tête lorsque les « orgues de Staline» ont préparé une attaque de l’infanterie et que les gens ont été déchiquetés à droite et à gauche, et comment il s’est remis à prier dans cette situation. À l’époque, je lui ai dit que la nouvelle Bundeswehr n’était pas destinée à la guerre, mais que la tâche des nouveaux soldats était de prévenir la guerre. Et j’y avais cru. Après tout, c’était l’esprit de notre constitution, qui était également enseignée à l’école.

Mon père était déjà contre le réarmement de l’Allemagne. Il m’a dit que maintenant, ça allait recommencer. Cela commençait toujours comme ça. Je m’étais secrètement moqué de lui, convaincu que l’armée allemande était purement défensive et qu’elle « empêcherait les guerres ». Jusqu’à ce que la guerre d’agression contre la Yougoslavie me révèle mon ignorance. Et j’ai dû réfléchir sans cesse à ce que mon père m’avait dit. Cela avait recommencé. Et j’avais honte de m’être moqué intérieurement de mon père.

Et jusqu’à sa mort à l’âge de 94 ans, ces cauchemars le hantèrent, dont il se réveilla en hurlant. Je pense qu’il aurait voulu s’excuser auprès du peuple russe, mais il avait trop honte pour l’approcher. Et c’est ce que je fais maintenant, au vu de la plus grande opération des puissances de l’OTAN dirigée contre la Russie, également depuis le sol allemand, dans l’espoir que vous compreniez que cette fois-ci, il y a un nombre toujours croissant de personnes qui ne veulent pas suivre le courant, qui luttent contre une guerre avec la Russie, même si elles sont encore assez réservées parce que le danger n’est pas encore entièrement reconnu.

Lorsque des scientifiques germanophones en pleine malice parlent à nouveau d’imposer « des idées d’ordre avec la puissance militaire » (1), lorsque les politiciens exigent à nouveau davantage d’opérations militaires, lorsque les médias diabolisent les gouvernements d’autres pays, lorsque l’armement est réalisé à une échelle sans précédent, alors nous savons que les leçons de la Seconde Guerre mondiale se sont lentement mais sûrement perdues.

Mais cela ne doit pas arriver. Pardonnez donc à mon père, et unissons-nous contre cette folie. Soyons amis, travaillons ensemble vers le même objectif. Un monde dans lequel les règles ne s’appliquent pas seulement aux plus faibles sur le plan militaire, mais à tous ! Un monde dans lequel les conflits sont résolus par la tentative de conciliation des intérêts, plutôt que par le chantage, les sanctions et les bombes, la puissance du plus fort. Un monde dans lequel les accords et les règles déterminent les actions des grandes puissances, et non la puissance économique et militaire dont elles disposent. Un monde où les gens se serrent les coudes par-delà les frontières pour contrôler « ceux qui sont là-haut », pour les empêcher de faire du mal.

Il est difficile de lutter contre l’endoctrinement, la pression sociale et le pouvoir des médias. Mais l’Internet a ouvert une fenêtre sur la réalité qui ne se referme que lentement. Essayons ensemble d’utiliser cette fenêtre pour crier haut et fort :

Paix – мир.

Venez nous rendre visite, comme nous vous rendrons visite. Formons des groupes communs sur Internet où nous nous rencontrerons et discuterons dans une langue commune. Entreprenons des actions communes pour nous dresser contre cette folie d’une nouvelle guerre. Contre cette folie provoquée par cette course aux armements, alors que de plus en plus de gens glissent dans la pauvreté, l’environnement se dégrade et le Tiers Monde semble ne voir dans la Chine qu’une lueur d’espoir.

Ne vous laissez pas provoquer par notre Establishment. L’Establishment veux que vous développiez la haine et que la diabolisation conduise à une division sociale toujours plus grande. Ne vous laissez pas avoir. Ayez pitié de ceux qui sont mal informés, de ceux qui suivent, comme si souvent dans le passé, la raison d’État, qui sont tombés dans le courant idéologique dominant, souvent dans l’illusion de la supériorité intellectuelle, et dans la croyance qu’ils sont en possession de la seule vérité. Nous travaillons dans le but de leurs enlever leur pouvoir. Nous nous engageons pour que le peuple allemand empêche les « autorités » ou les « marchés » de nous pousser dans une nouvelle guerre. Une guerre qu’aucune personne raisonnable en Allemagne ou en Russie ne souhaite.

Je vais maintenant me mettre à la recherche d’un auteur russe qui a également été élevé par la génération de la guerre et qui a peut-être vécu une évolution similaire à la mienne. J’aimerais l’inviter à passer ses vacances avec moi afin que nous puissions écrire un essai commun sur la façon dont la génération de l’après-guerre a vécu le développement des dernières décennies. Le mot clé devrait être « ensemble ».

Et j’aimerais qu’il y ait beaucoup de gens comme moi. Des carreleurs, des électriciens, des employés, des musiciens, peut-être même des fonctionnaires et des soldats, des enseignants, des infirmières et des médecins, des pompiers et des policiers, oui, des politiciens aussi. Chaque groupe professionnel devrait chercher des partenaires dans l’autre pays et examiner avec eux le sens de ces grandes opérations aux frontières de la Russie. Ce qui a fonctionné après la guerre avec la France en raison de l’engagement politique massif doit maintenant fonctionner aussi grâce au mouvement massif des populations en Allemagne et en Russie, pour enfin mettre fin à la politique de division.

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Merci à l’auteur pour le droit de publication.

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Source de l’image: Viacheslav Lopatin / shutterstock

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